Tu es pressé contre le mur. Le canon d’un fusil dans ton dos. Coincé. « à genoux! » siffle la voix derrière toi. Des jambes en caoutchouc, un cœur qui hurle dans tout ton corps. La sueur, car tu sais que plier les genoux signifie que le canon se retrouvera à la hauteur de ta tête. Un boum et tu es mort.
Te voilà, pressé contre le mur, dans une vie, une vie qui peut briser ta tête. Besoin d’argent, mais tu ne l’as pas, et partout où tu vas, on t'en demande. Tu es comme un étranger dans une ville immense. Besoin d’argent, mais tu ne l’as pas et partout où tu vas, tu es humilié, tu dois attendre dans la queue, faire tes preuves, faire croire aux autres que tu fais de ton mieux pour trouver du boulot, que tu obéis bravement, que tu fais « oui » de la tête en regardant vers le bas. Tout à fait comme devant le tribunal, où nous nous retrouvons quand nous ne payons pas nos factures, où nous pouvons atterrir quand nous prenons ce dont nous avons besoin, quand nous volons.
« Ne me détruis pas, laisse-moi vivre » une supplication marmonnée à la grâce de celui qui te met au pied du mur. Mais c’est qui, pourquoi ? D’où viennent ces murs et les gens qui y trouvent leurs comptes ? Maintes fois que tu étais là, là contre ce mur ou un autre, espérant que celui qui fait la pluie et le beau temps est de bonne humeur aujourd’hui. Le monde te coince. Tu prends une raclée, parce que tu es enfant, tu es femme, pauvre, immigré ou sans-papier. Pour qu’eux, ils puissent continuer, continuer à construire leur empire, leurs murs, la distribution de fonctions de portiers, de matons, de vigiles. Pour qu’ils puissent devenir encore plus riches, pour qu’ils puissent contrôler. Parce que ça les arrange bien que l'on soit à terre.
Te voilà, contre ce mur et tu te sens petit. Où est allée ta fierté ? Pourquoi cette peur pour ceux qui exercent du pouvoir sur toi, pourquoi baiser leurs pieds ? Te voilà, tu te sens petit… jusqu’à il y a quelque chose qui pète, bien profondément, en toi. Et tu penses… Cette société n’est pas la mienne, pour mes problèmes, elle ne connaît pas de solution. Ta croyance dans ce monde est perdue pour de bon, tout lien avec cette société appartient maintenant pour toujours au passé. Ton chagrin et ton sentiment d’impuissance font place pour la rage et la fermeté de rendre les coups. A ce jeu, je ne joue plus. Je revendique le pouvoir sur ma vie. Et alors il te pousse des ailes…
Ton coude s’élance derrière et touche la gorge du gardien qui est là. Avec ton autre main, tu saisis son flingue et en moins d’une seconde, tu le presse sur sa trempe. Ce mur, il sautera. Il sursaute, car sa fonction consiste à humilier, intimider, menacer, faire chanter. Par là, les gens se sentent automatiquement petits. Mais il s’est heurté à de la résistance. Il sursaute, tout comme ses maîtres, qui se laissent protéger par des grillages et des flics, par des tribunaux et des prisons. Il sursaute et tu lui colles la tête contre le mur. Ce mur, je le fais sauter et si toi tu t’y accroche pour protéger toi-même et ce monde, tu sauteras avec. Ton visage contre son oreille et tu y craches les mots : « Pas d’autre choix que ma révolte. Trop de drogues, trop de morts, trop de problèmes, de prison, de malheur. Je veux vivre et donc… Pas d’autre choix que ma révolte, ce n’est pas moi, mais ce monde qui doit être brisé.
Un boum perturbe le cours normal des choses. Aujourd’hui ce n’est pas toi qui a reçu les coups, mais la société qui te veut petit. Tu t’en vas et tu vas dormir. Le lendemain, tu te réveilles avec un sentiment doux. Mon destin, j’essaye de le garder dans mes propres mains. Tu te lèves, tu pars. A la recherche, en route...