Pour la fin de ce monde-ci

La fin du monde nous a été annoncée pour quelque part fin décembre dans les journaux, à la télévision et dans les brouillards virtuels du Net. Non qu'il y eut ne serait-ce qu'un journaliste pour y croire vraiment – à vrai dire on n'a pas trouvé beaucoup de croyants à cette occasion –, ils s'en foutaient royalement ! A vrai dire, pour toute personne dotée d'un peu d'esprit critique, tous ces journalistes réunis au bout du monde, ce 21 décembre, pour une nouvelle qu'ils avaient eux-mêmes créée de toute pièce formaient une vue dégueulasse ! Eux s’en foutaient royalement, leur but ayant atteint : ils avaient retenu des millions de gens devant leurs écrans de télévision. Car, comme toujours, il s’agissait bien de ça : prêcher le grand événement sensationnel afin que tout reste finalement pareil ; éduquer des spectateurs passifs à avaler sans broncher ce qu’on leur fait croire. Comme lors des élections, médias et politiciens tentent toujours de nous jeter de la poudre aux yeux.

Ceux qui ne s’avachissent pas étourdiment derrière leur écran de télévision ou d’ordinateur, ne peuvent que constater que le monde n'a pas péri et qu’on se retrouve une fois de plus avec la même merde hypocrite sur les bras, coinçés entre l’argent et le pouvoir. Attendre ne fait pas avancer les choses. Nous devrons nous-mêmes mettre la main à la pâte. Heureusement, nous sommes sans cesse plus nombreux à ne plus rien espérer des faux prêcheurs. Ainsi, par exemple, après la dernière foire électorale, le pouvoir n'a pu cacher qu’à Bruxelles, presque une personne sur quatre n'était pas allée voter. L’abîme qui sépare la réalité des journalistes et des politiciens de celle de nos vies est profond.

Parallèlement, de plus en plus de gens remarquent que règne, dans les médias, un silence suspect autour des prisons. Evidemment, les affrontements continuent en leurs murs, entre les esprits rebelles et les lèche-culs du pouvoir : occupations de préau, batailles avec les matons, mais aussi matons se vengeant lâchement de ceux qui se révoltent. Ils peuvent faire comme si de rien n’était, mais nous savons mieux. La solidarité s’organise et s’arme. On voit le même phénomène dans la rue : pendant qu’un politicien tape le scandale dans les médias et exige plus d’effectifs policiers, nous savons que l’éclairage publique qui ne fonctionne plus (du fait des saboteurs) dans quelques rues d’Anderlecht (et d'ailleurs !) fait surtout peur aux amateurs de l’ordre et à ses troupes de choc. Les nuits obscures nous protègent contre les limiers et leur régime de terreur. Leurs plans, visant à nous placer sous l’œil omniprésent de leurs spots et caméras, se heurteront toujours à la rébellion créative et infreinable

Le constat s’impose : le monde des journalistes et des politiciens, le monde que les puissants nous montrent, ne correspond pas à ce que nous voyons autour de nous, à ce que nous vivons. Leur monde n’est pas notre monde. Ne plus rien espérer de leurs bavardages, ne plus croire à leurs prétentions n'est qu'un premier pas. Vient ensuite le deuxième : se donner les moyens de créer notre propre monde. Mais cela ne se fait pas sans coup férir. La démocratie ne tolère pas les révoltés : la répression s’intensifie, le contrôle s'accentue, les uniformes se multiplient, de nouveaux murs de prison sont érigés. C'est pourquoi nous proposons de ne pas attendre, et de passer à l’attaque. Des actes rebelles se parlent et se renforcent. Les cris de liberté d'au-delà de la Méditerranée trouvent ici un écho. Les défis viennent à notre rencontre, nous sommes en route.