Chacun a vu au moins une fois dans sa vie les images de camps de réfugiés en Afrique. Chacun a entendu au moins une fois les histoires de gens fuyant la misère, la guerre et les désastres, avant de finir dans ces camps. Le drapeau de la Croix Rouge y a fièrement flotté au vent plus d’une fois.
Désormais, ces tristes camps ne sont plus le privilège exclusif de l’Afrique. Ici aussi, en Belgique, la Croix Rouge a ouvert il y a une semaine deux camps de réfugiés, situés sur des domaines militaires. Des lits ont été installés dans des hangars, un approvisionnement alimentaire mis en place, et un système de papiers, de permis et de tampons organisé pour accueillir des centaines de refugiés ayant officiellement fait une demande d’asile.
Loin des regards et des centres-villes, loin de toute possibilité de reconstruire une nouvelle existence (fût-elle en clandestinité) ou de nouer des liens, puis entourés de barbelés. Voilà l’accueil réservé par l’Etat belge aux milliers de gens qui ont atterri ici avec le courage du désespoir. Il a même fait appel à une de ces organisations spécialisée dans la sélection et l’enfermement de gens qui se trouvent dans des conditions misérables : la Croix Rouge.
Dans plusieurs pays européens, cette « organisation caritative » gère déjà des prisons où les sans-papiers sont enfermés en attendant leur déportation (c’est-à-dire l’équivalent des centres fermés ici). En Belgique, la Croix Rouge gère aussi des dizaines de soi-disant « centres ouverts ». Il s’agit souvent d’anciennes casernes et d’hôpitaux. Les gens qui ont fait une demande d’asile sont renvoyés vers ces centres pour obtenir le « droit légal » à un peu de nourriture, à un toit et aux soins médicaux d’urgence. Quand leur demande d’asile est refusée, la police n’a alors même plus besoin de traquer ces gens : il lui suffit tout simplement de les cueillir dans les centres de la Croix Rouge. Cette dernière a d’ailleurs officiellement pris des accords en la matière avec l’Office des Etrangers.
Mais même à l’intérieur des centres, le régime est déjà sévère. Pour toucher leur « argent de poche » de 10 euros par semaine, les réfugiés sont par exemple obligés d’effectuer toutes sortes de travaux ; les vêtements que les gens donnent à la Croix Rouge y sont également revendus, sous prétexte d’« apprendre la valeur de l’argent aux demandeurs d’asile ». Enfin, les médecins de la Croix Rouge leur distribuent volontiers des tranquillisants, et ceux qui refusent de les prendre sont menacés d’expulsion.
Et comme si tout cela n’était pas encore assez abject, voilà maintenant que deux nouveaux camps de réfugiés s’ouvrent en Belgique : des endroits où des gens sont séparés du reste de la population selon des critères administratifs, où des gens dans une situation extrêmement difficile sont menacés et manipulés avec la hantise de la déportation et des permis de séjours ; où les « hommes en blouse blanche » font la loi, et où les « hommes en uniforme bleu » sont toujours les bienvenus. Le tout, organisé sous le drapeau de la charité.
Quelqu’un a-t-il quelque chose à redire sur ces camps de concentration pour pauvres ?