C’est avec beaucoup de peine que nous disons adieu à

Hans Meurisse, directeur général des prisons belges

Dévoué comme seul lui l’était, Hans nous a quitté dans le cadre de l’exercice de ses fonctions. Il faisait une visite de travail à la prison de Verviers pour vérifier que celle-ci puisse bien être qualifiée de « délabrée » et de « délétère ». Alors qu’il inspectait un mur particulièrement vétuste, il a été écrasé par un bloc de béton. Aplati, raide… Hans était mort sur le coup.

Mais laissons en suspens cet événement particulièrement cruel, parcourons la vie aventureuse et zélée de notre cher Hans. Quittée l’école secondaire, Hans choisissait déjà résolument la direction qu’il suivra tout au long de sa vie. Fièrement, il s’inscrivit à la faculté de Droits. Entouré de futurs collègues juges, directeurs pénitentiaires, psychologues judiciaires et commissaires, il fut initié aux secrets de la loi pénale afin de suivre sa vocation de défendre la propriété privée et la morale étatique. Ne reniant pas une certaine tendance à la perversion, Hans fut attiré vers l’illustre science de l’enfermement, du cassage psychologique du caractère criminel. Avide de savoir, il apprenait toutes les théories carcérales qui ont été développées avec précision et zèle au cours des siècles. On pourrait dire qu’à la fin de ses études, Hans, entièrement dévoué à la cause, avait développé plus d’imagination autour de comment enfermer et isoler que sur le « comment faire l’amour ». Ses appétits sexuels au lit diminuaient de manière inversement proportionnelle à ses désirs un peu sadomaso concernant le délaissement exploitable de ses futurs sujets. Mais il apprenait, il apprenait, et obtenait brillamment son diplôme.

Après avoir acquis toutes ces conceptions théoriques, Hans s’est jeté de manière optimale dans la mise à l’épreuve de ses constatations sur des cobayes vivants. Il devint directeur à la prison de Gand et y apprit toutes les ficelles du métier. Déjà à ce moment-là, il n’était pas donner à tout le monde de savoir apprécier l’honorabilité de sa fonction ni de sa personne, et ces éléments criminogènes ont commencé à éprouver une haine féroce envers sa personne. Ambitieux, Hans ne voulait pas rester un « simple » directeur de prison, son étoile montait vite et enfin il pouvait accéder au siège de directeur général des institutions pénitentiaires du Royaume de Belgique.

Contrairement à ce que des mauvaises langues ont pu prétendre, Hans n’a jamais perdu le contact avec la réalité de chaque prison. Il les aimait trop. Il s’est toujours efforcé à prendre soin en personne des « clients embêtants ». Il nous en a encore fourni la preuve en s’investissant personnellement dans la construction de deux modules d’isolement, des prisons à l’intérieur de la prison, à Bruges et à Lantin. Et non par pour ensuite déléguer la gestion de ces modules à quelqu’un d’autre. Non. Il a courageusement pris cette responsabilité sur ses épaules. Chaque jour, il se penchait sur le sort des isolés, il donnait ou refusait les permissions pour d’éventuelles adaptations de régime, il décidait si un isolé méritait de manger avec des couverts normaux,… Et cette implication zélée, cet engagement, n’a pas toujours su être reconnue à sa juste valeur par tout le monde. Quand le Ministre de la Justice s’est rendu en personne à la prison de Bruges pour y faire une petite visite de l’établissement et qu’une heure plus tard quelques prisonniers s’étaient évadés en hélicoptère, Hans a dû se cacher, se planquer. Sa résidence officielle fut cernée par des unités d’intervention spéciale de la police,… tant il semblait possible et probable qu’au moins un de ces évadés voulait venir le remercier personnellement pour les services rendus.

Y aura-t-il quelqu’un à sa hauteur pour le remplacer ? On ose en douter. La gestion des dizaines de prisons qui sont littéralement sur le point de s’écrouler, dans lesquelles des prisonniers n’ont toujours pas oublié qu’il est possible de se mutiner et dans une situation de fortes tensions sociales qui fait que toujours plus de gens se retrouveront derrière les barreaux, être directeur général ne doit pas être facile.

A tout seigneur tout honneur.
Et gare aux blocs de béton !