Une grève molle... on ne peut pas en rester là


Molle. Voilà la seule expression appropriée pour qualifier la grève générale du 30 janvier dernier. A part des débrayages bien suivis dans l’industrie lourde, quelques piquets bloquant l’accès à des zonings industriels et la paralysie des transports en commun, l’ordre économique et social n’était en rien perturbé ce jour-là. Evidemment, tout avait été mis en œuvre pour décourager les gens à faire grève (dans les médias, par les organisations patronales et tous les partis politiques). Pareil d’ailleurs pour les centrales syndicales, qui en fin de compte, ont préféré organiser un semblant de grève, une mise-en-scène par leurs délégués les plus loyaux envers la hiérarchie, plutôt que de risquer qu’un mouvement de grogne s’exprime ce jour-là.

Loin de nous l’idée d’accuser les syndicats d’avoir trahi leur base. Ils remplissent tout simplement leur fonction intrinsèque : étouffer la conflictualité sociale sur les lieux de travail et parmi les salariés, leur enlever toute possibilité d’action autonome et auto-organisée, leur inculquer la mentalité syndicaliste, c’est-à-dire à former un « pouvoir », respectueux envers les employeurs et l’économie, défenseur des intérêts des salariés tout en restant toujours à l'intérieur du système en place. Et oui, enfin, – car il y en a (et peut-être sont-ils plus nombreux qu’on pense) – que ceux qui se trouvent encore au sein des syndicats mais se battent contre l’économie, renoncent ou les abandonnent. Dans les combats à venir, les syndicats seront des freins, comme ils l’ont démontré une fois de plus ce 30 janvier.

Mais comment faire alors pour s’opposer aux mesures d’austérité? Une chose primordiale s’impose avant de chercher à y répondre. Dans les transformations en cours des structures économiques et politiques, dans le durcissement programmé des conditions de travail et de survie qui se dessine, dans l’appauvrissement qui s’étend, ça n’a (plus) aucun sens d’espérer de pouvoir gratter quelques miettes, ni de croire pouvoir arrêter la marche forcée vers l’austérité. L’Etat social, la « protection » par l’Etat des travailleurs en échange de leur musellement (la fameuse « concertation sociale »), Papa-Etat qui prend quelque peu soin des malades, des handicapés, des vieux,…, tout ça, c’est en train d’être rayé de la carte européenne. L’avenir, c’est le conflit ouvert, sans médiation, entre ceux qui ont beaucoup et ceux qui ont peu… ou, ce qui se dessine et est encouragé par le pouvoir, le conflit sans merci entre tous ceux qui n’ont presque rien. Se défaire de toute illusion sur un possible aménagement, c’est le premier pas à faire afin de descendre dans l’arène du combat social.

Aujourd’hui, il ne s’agit pas de former un bloc (politique ou syndical) contre le pouvoir et les mesures d’austérité, mais de saper ces structures. Diffuser le refus du travail ; inventer des formes auto-organisées d’autodéfense et de solidarité contre l’Etat, les huissiers qui livrent la chasse aux pauvres, les vigiles qui protègent les richesses,… ; saboter les engrenages de l’économie ; couper court au contrôle social ; attaquer partout où c’est possible les riches. Trop radical, impossible, vous dites ? Mais alors, soyez prêts à embrasser votre destin de mener une vie de merde et de mourir comme un chien, un déchet usé par l’économie et le pouvoir ! Si les esclaves préfèrent rester esclaves, qu’ils ne viennent pas se lamenter!

Comment commencer à agir ? C’est fort simple. A ceux qui ont les yeux ouverts, les occasions ne tardent jamais à se présenter. Commençons tout bêtement par agir là où nous nous trouvons, contre ce à quoi nous nous heurtons. Que ce soit un patron, l’ONEM, le CPAS, les huissiers, les vigiles dans les supermarchés, les pacificateurs de la rage dans les quartiers, les banques, les agences d’emploi et d’intérim,… Mille-et-un modes existent pour les perturber, leur rendre des coups, les attaquer, les dé… parce qu’il n’y a pas d’aménagement possible. Auto-organisons-nous à quelques-uns ou à plus nombreux, c’est-à-dire sans parti ni syndicat, afin d’intensifier ou d’entamer les hostilités. Jouons, c’est le mieux qu’il y a à faire. La seule chose que nous risquons, c’est de ne pas mourir esclaves.